On se fait souvent des idées exagérées de ce que l’on ne connaît pas.

C’est comment une séance de sophrologie ? Si la sophrologie est largement définie, expliquée et commentée, ce qui se passe dans la séance de sophrologie, est plutôt discret.

Et pourtant, actuellement, les sophrologues interviennent dans tous les domaines de la société (éducation, santé, social, travail, sport, etc.) pour préserver, maintenir ou améliorer le bien-être ou la qualité de vie de l’individu, développer ses capacités ou favoriser son intégration sociale.

Le public et les futurs élèves qui briguent ce métier, doi­vent pou­voir avoir accès, à ce qui « fait » une séance de sophrologie,  la méthode, mais aussi à la posture, c’est à dire à la manière « d’être avec ….. » du sophrologue pendant la séance.

Être avec la « personne », pour l’accompagner vers l’autonomie, vers la conscience de soi même, de ses ressources et de ses potentiels.

Il y a  à l’origine, une rencontre, celle du sophrologue et de cette personne. Première étape du « travail » cette rencontre scelle le lien, la relation qui va permettre l’accompagnement sophrologique, à partir d’une demande – remise en mouvement -, c’est l‘alliance.

Le « savoir » du sophrologue est convoqué partant de l‘idée que le sophrologue a une formation confirmée, accomplie à la sophrologie.

Dans de cette demande la rencontre peut s’organiser selon divers axes : La recherche d’un expert,  d’un formateur, d’un consultant, d’un coach, d’un mentor, parfois la recherche du « pourquoi » d’un symptôme, d’un mode de fonctionnement pour aller vers une reconstruction et un mieux-être.
Mais aussi, pas aussi simplement que ça, rechercher la dimension existentielle d’un pédagogue pour observer, se relier et se dévoiler d’abord à soi, éliminer les obstacles dans l’expérience, prendre conscience, décider et choisir.

Une séance de sophrologie est donc un temps pendant lequel il y a une rencontre, une relation et un temps pour vivre le protocole sophrologique. Le travail se passe, certes au niveau somatique, mais c’est par la parole et la compréhension que va s’établir la relation. Alors comment est dans cette relation le sophrologue ?

« Ne pas se mettre en avant mais ne pas rester en arrière. »

Le travail en groupe suppose pour le sophrologue une position que j’ai envie d’appeler « haute », il propose, à partir de son expertise, un contenu adapté à la demande du groupe. Le travail en individuel suppose lui une position « basse », le sophrologue accompagne totalement le processus du client. Lui seul sait et a les réponses et le sophrologue y est présent, modestement.

Pour cela deux fonctions entre en jeu, la première réceptive, la seconde active.

La première offre empathie, bienveillance, authenticité, simplicité, présence, écoute inconditionnelle et non jugeante, implication (c-à-d engagement auprès du client). Sans oublier le savoir reformuler, questionner sans être intrusif, utiliser le silence, comprendre avec acuité.

Quand le client est confirmé dans ce qu’il a de bon et de juste en lui, ses capacités et ses ressources, il retrouve l’envie de vivre, de faire des projets et de désirer. S’il n’y a pas de contact réel et actif (vivant), s’il ne rencontre que le silence et s’il n’est pas reconnu dans son droit à exister et à être ce qu’il est, il ne peut se développer.

C’est la deuxième fonction qui organise le respect du cadre, – pas passage à l’acte, ni de manipulation à des fins personnelles mercantiles. S’y ajoute le respect de la confidentialité (qui n’est pas le secret). Et aussi l’obligation de neutralité c’est à dire ne pas influencer le client par ses propres valeurs. Dans cette  fonction le sophrologue est force de proposition dans l’établissement du protocole qu’il élabore et propose.

Pour permettre le changement à l’origine de la démarche, le sophrologue s’implique activement. Modifier la « cohérence » qui limite le client, nécessite de sa part une cohérence au moins aussi forte. Pour garder la distance, il lui faut instaurer un cadre rigoureux. Sa capacité à l’instaurer et le maintenir tout au long de l’accompagnement sophrologique est une des conditions nécessaires au bon déroulement de celui-ci. Alors, son client pourra franchir les étapes vers le changement, une à une.

Finalement je ne fais ici que reprendre ce que toute formation professionnelle en sophrologie qui considère que le sophrologue exerce un métier à part entière transmet pendant le temps de formation. Ne soyons pas exclusifs d’autres professions ont ces critères de base.

Et la spécificité du sophrologue dans sa posture serait de quel ordre ?

Dès que l’on se place pleinement et uniquement dans la posture sophrologique, ce qui est en œuvre dans la relation avant tout, et qui se perçoit dans la conduite globale de la rencontre, et pas seulement dans l’animation de la séance, c’est:

 L’importance de l’ici et maintenant. C’est dans cette présence absolue à l’ici et maintenant que se passe la séance. La volonté d’être avec ce qui se passe maintenant sans aller rechercher, si ce n’est pour voir une évolution, des attitudes, des comportements ou des histoires du passé – des projections sur le futur. Laisser s’écrire, comme sur une page blanche, le changement sans l’entraver par des retours en arrière l’enfermant dans ce qui lui fait mal ou des sauts dans un futur qui lui est difficile. Les ressources, les capacités sont là, même s’il ne le sait pas, dans le présent.

L’absence de diagnostic. La sophrologue ne fait pas de diagnostic, premièrement parce que, à de rares exceptions près, il n’en à pas les moyens ! La sophrologie propose un dévoilement graduel de la personne, le client va progressivement se découvrir ou se redécouvrir. Poser un diagnostic limite la rencontre avec la réalité, dans le sens ou risquent de n’être retenus que les items correspondant au diagnostic.

Le renoncement au mystère, à l’autorité. Le sophrologue se doit d’être clair et d’informer complètement le client (ou le groupe), de ce qui est en œuvre non seulement pendant le temps de la séance, mais de ce qu’est la sophrologie (Entre autres des techniques non sophrologiques associées) – ses hypothèses de base -, sa raison d’être et de ce qui doit être fait pour progresser. L’art d’établir une forme de partenariat ou de collaboration pour que le client participe complètement et en conscience à son propre développement –pour qu’il s’ y engage – est à ce prix.

Créer chaque relation ou l’adaptation à chacun.  C’est à l’intérieur non seulement du discours, mais aussi de son comportement et de son corps, que sont logées les ressources et capacités propres au client. Ce monde est étranger au sophrologue. Il doit rester à l’écoute de ce que son client lui dépose. C’est avec beaucoup de curiosité (et non pas de voyeurisme !) et d’attention qu’il écoute son récit, qu’il observe ses comportements. Le matériel disponible pour construire une issue est là.  L’intervention est construite à l’intérieur de cet espace et respecte l’intégralité de la personne. Si la séance même de sophrologie peut être « standardisée, ou protocolisée » la relation ne peut l’être, la créativité du sophrologue rendra l’accompagnement plus réel et plus efficace. Il y a une recherche commune de ce que sera la route, l’espace singulier du client. On ne sais pas à l’avance ce qu’il serait bon d’éprouver, d’atteindre dans la vie.

L’expérience et l’intégration. « La sophrologie une expérience à vivre. » La séance de sophrologie est une expérience globale. L’expérience de la méthode bien sûr mais pas seulement, l’expérience d’une relation particulière entre deux personnes qui s’accueillent l’une l’autre, pour que le client parvienne à s’accueillir lui même dans ses potentiels et ses ressources.

Le positif et la validation : La recherche du positif en sophrologie n’est pas la recherche exclusive du bien être immédiat, ça peut être aussi « affronter » ou « se confronter » à l’inconfort, voire à la difficulté pour aller « au delà », vers le changement souhaité promesse de mieux être. De séance en séance des signes de la remise en mouvement sont là. Ils se repèrent dans des nouveautés impensables antérieurement. Le sophrologue veille à ce que le système, précédemment figé, redevienne dynamique. Les échanges en séance sont faits pour collecter l’expression de cette différence dans la vie du client. Le sophrologue valide, voire encourage cette avancée.

En validant étape par étape, le chemin qu’a pris le client ou le groupe, il peut poursuivre dans son accompagnement. Il vérifie si, une fois la demande initiale satisfaite, la nouvelle situation est celle attendue. Engagé avec un client dans un cheminement, il interagit avec lui, cela signifie qu’il partage avec lui ce qu’il observe, ressent et expérimente au travers des interactions dans l’instant présent.

Le dévoilement par l’authenticité. Le sophrologue doit être le premier à respecter le cadre, y compris en se montrant comme un être ordinaire qui a ses limites et n’est pas tout puissant afin de permettre au patient de rentrer dans la réalité. Le sophrologue n’est pas extérieur au monde, il est inclus dans la situation, il est un participant actif des interactions. Être sophrologue, ce n’est pas seulement utiliser un savoir ou des outils, c’est un engagement entier de l’être dans la relation au client par la présence, l’écoute, le ressenti… C’est une remise en question constante de sa pratique, une capacité sans cesse renouvelée de ses choix.

La relation n’est pas, loin s’en faut l’objectif de la séance de sophrologie, en même temps le client redécouvre dans la séance l’art de la relation à soi même. C’est certainement là que se situe l’important de notre exercice. Dans la définition même de la sophrologie, la conscience a la place majeure. Si nous acceptons cette définition de la conscience « Capacité de se décrire, de se définir et de choisir »,  il y a bien cette nécessité non seulement d’être en relation avec le monde mais d’être en relation avec soi-même de connaître ses états, ses actes et leur valeur morale. Chemin pour se sentir exister, pour être présent à soi même. Socrate  face à l’oracle de Delphes et son « connais toi toi-même » démontre qu’une mauvaise connaissance de soi à un impact sur la connaissance du monde  (et réciproquement, puisque nous faisons partie du monde).

Jacqueline Baudet